Quel rôle joue la faune aquatique dans la dissémination de l’antibiorésistance ?

Dans la revue bibliographique « The potential contribution of aquatic wildlife to antibiotic resistance dissemination in freshwater ecosystem: A review » parue en avril dans Environmental Pollution, les récentes avancées scientifiques concernant la dynamique de la résistance aux antibiotiques dans les écosystèmes aquatiques ont été analysées, en se concentrant sur le microbiote intestinal des vertébrés aquatiques. Cette analyse questionne l’effet « bioréacteur » de ces microbiotes. Par exemple, les organismes brouteurs et filtreurs ingèrent des bactéries résistantes présentes dans les biofilms et la colonne d’eau, respectivement. L’ingestion de bactéries résistantes aux antibiotiques et la digestion dans les microbiomes de la faune aquatique contribuent-elles à amplifier ou au contraire à atténuer la dissémination de l’antibiorésistance dans les écosystèmes aquatiques ?

L’utilisation d’antibiotiques en santé humaine et animale conduit à répandre ces contaminants émergents dans l’environnement, dans les eaux de surface ou dans les sols. Du fait des connections entre écosystèmes, les antibiotiques sont omniprésents, et favorisent la sélection de bactéries résistantes à ces antibiotiques. Des bactéries résistantes ont été reportées de l’Arctique à l’Antarctique, dans les eaux, sols, sédiments, biofilms, nuages… La résistance aux antibiotiques est considérée comme une grave menace pour la santé humaine à l’échelle mondiale. Les processus de dissémination de l’antibiorésistance dans l’environnement et leurs répercussions sur la santé humaine restent mal compris.

L’exploration du microbiote intestinal de la faune terrestre et aquatique a démontré que leur microbiote constitue un réservoir de bactéries résistantes aux antibiotiques. Mais la publication intitulée «The Potential Contribution of Aquatic Wildlife to Antibiotic Resistance Dissemination in Freshwater Ecosystems: A Review » met en évidence que, au-delà de constituer un réservoir, la faune pourrait jouer un rôle soit d’atténuateur soit d’amplificateur de dissémination d’antibiorésistance dans les écosystèmes. En effet ces organismes sont exposés à des antibiotiques, ingèrent des bactéries porteuses de résistances, celles-ci interagissent avec le microbiote de l’hôte, puis le microbiote résultant est répandu dans l’environnement. Quelques études menées en milieu contrôlé montrent que le microbiote favorise le transfert horizontal de gènes de résistance entre bactéries, et soutiennent l’hypothèse d’amplification. Mais dans d’autres cas, la présence d’un organisme aquatique a causé la diminution de l’antibiorésistance dans l’eau environnante, soutenant l’hypothèse inverse, d’atténuation.

Cette revue ouvre donc la voie de futurs travaux de recherche au sein du CRBE, notamment au travers du doctorat d’Alexandre Thibodeau mené dans le cadre du projet projet Européen PRESAGE.

Les 5 auteur.ices font partie de l’équipe ECI. Alexandre Thibodeau est doctorant, et est supervisé par Eric Pinelli (directeur de thèse), Florence Mouchet (co-directrice) et Maialen Barret. Van Xuan Nguyen, post-doctorant dans l’équipe, a contribué à la réflexion et à la rédaction.

Références

Thibodeau, Alexandre J., Maialen Barret, Florence Mouchet, Van Xuan Nguyen, and Eric Pinelli. 2024. ‘The Potential Contribution of Aquatic Wildlife to Antibiotic Resistance Dissemination in Freshwater Ecosystems: A Review’. Environmental Pollution, April, 123894. https://doi.org/10.1016/j.envpol.2024.123894.

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